Que suis-je ?

Des têtes de Bouddha en kaléidoscope, sommet de la tête contre sommet de la tête.

Puis me voilà assise en tailleur face à la porte en miroir de mon entrée, je suis Dewa Chenpo, habillée exactement comme lui, et pourtant mon visage est reconnaissable, quelque peu déformé, tout comme ma coiffe rouge, l’image « ondule ».
Paris, la Seine. Une partie s’effondre, comme si elle n’était pas suffisamment accrochée à ma mémoire.
Le monde peut chavirer, disparaître, en un instant.

Quelques pas au bord de mer ce midi. Le vent a dégagé le ciel, la plage devenue déserte, a aplani la surface de l’eau.
Tout est clair et vif, l’air et l’eau.
La frange des vagues, celle qui vient mourir sur la sable, tout à la fin, légèrement moussue, s’étale doucement et semble prendre son temps, s’adoucir, ralentir… une vague, deux vague, plus lente encore… la mouette suspend son vol…
le monde s’arrête… à chaque instant…
comme si, en prêtant attention, je pouvais percevoir que le monde est en pause, à chaque seconde, chaque demie seconde, quart de seconde (suite infinie qui tend vers zéro), comme des interstices révélés… un peu à la manière des films, succession d’images que notre perception n’a pas la capacité de saisir et voit en continu. 

Et dans ces interstices, ces espaces entre, une possibilité d’effondrement, à chaque instant renouvelée, et une promesse d’infini, insaisissable, comme un champ de potentialités inappréhendable, dense… et vide tout en même temps.

Le monde est autre.